Regards croisés entre militante locale et élu national


DROIT au logement : les vrais combats à mener

Avec 43 propositions de loi écrites ou co-signées, Iñaki Echaniz, député socialiste de la quatrième circonscription des Pyrénées-Atlantiques, est le grand témoin de ce deuxième Regards croisés. Il est interrogé par Mathilde Manso, militante dans la section du 12e arrondissement de Paris.

Mathilde Manso: Tu as fait du logement digne et durable ton cheval de bataille. Peux-tu nous expliquer pourquoi?

Iñaki Echaniz: La crise du logement est particulièrement prégnante sur mon territoire. En zones touristiques les habitants ne peuvent plus se loger et sont contraints à s’exiler loin de chez eux.

Le logement, indispensable à l’insertion sociale et économique, est un bien de première nécessité et il représente le plus gros poste de dépenses des ménages. Paradoxalement, à mon arrivée le sujet était peu investi, j’ai alors souhaité sensibiliser mes collègues.

Ta proposition de loi supprimant la niche fiscale Airbnb a été votée en première lecture le 29janvier dernier. Elle ouvre par exemple la possibilité aux maires de limiter les locations de courte durée sur leur commune. Et concernant le volet lié à la fiscalité, qu’en est-il?

I.E.: Aujourd’hui, il existe, pour les meublés de tourisme classés, une niche fiscale très avantageuse de 71 % jusqu’à 188 700 euros. Les locaux meublés de tourisme « simples » peuvent bénéficier d’une niche fiscale de 50 % jusqu’à 77 700 euros. Pour la location « nue » de longue durée, l’abattement n’est que de 30 % jusqu’à 15 000 euros. Cette inégalité incite donc les propriétaires à mettre leur bien en location de courte durée et tend à priver les habitants de logements à l’année. Nous avons donc proposé de réviser cette niche en l’alignant à 30 % et en abaissant le plafond à 30 000 euros. Le texte propose cependant des exceptions pour les meublés des stations de ski, les gîtes ruraux et les maisons d’hôtes.

Alors que le 1erfévrier 2024 marquait les 70 ans de l’appel de l’Abbé Pierre, le Premier Ministre, lors de son discours de politique générale, ouvre la porte à une modification de la loi le SRU en ajoutant les logements dits intermédiaires dans les 25% de logements sociaux de la loi SRU. Une façon implicite de baisser les quotas de logements sociaux?

I.E.: C’est en effet une annonce inquiétante. La loi SRU n’est déjà pas respectée dans certaines communes, et, à date, plus de 2,4 millions de ménages sont en attente d’un logement social. Par ailleurs, de plus en plus de Français sont éligibles à un logement social. L’urgence n’est donc pas de favoriser le logement intermédiaire pour des publics moins fragilisés.

Le groupe socialiste va proposer dans les prochaines semaines le retour de la garantie universelle des loyers.

I.E.: La garantie universelle des loyers fonctionne comme une sécurité sociale des loyers. Concrètement, elle garantit à tous les locataires de bonne foi, qu’en cas de difficulté, leur loyer sera payé temporairement par l’État. C’est une solution gagnante à la fois pour les propriétaires et pour les locataires. Les premiers voient leur risque d’impayés devenir nul ce qui les incite à louer. Les seconds bénéficient d’un accès facilité au logement puisque libérés de critères de revenus ou de salaires injustifiés et protégés contre les risques d’expulsion en cas d’impayés.

Alors que le terme de jeunesse sacrifiée est employé depuis la crise sanitaire, crois-tu qu’elle se verra aussi sacrifiée du droit à la propriété, devenu mission impossible entre inflation et envolée des taux d’intérêt?

I.E.: Ça en prend dangereusement le chemin… Alors que 3,5 % des propriétaires possèdent 50 % du parc locatif privé, l’accès à la propriété est déjà rendu extrêmement compliqué pour nombre de jeunes ménages modestes soucieux d’assurer leur avenir. Les jeunes primo-accédants sont également parmi les plus concernés par les difficultés d’emprunt. Il faut prendre des mesures pour eux, pour les plus précaires et les classes moyennes.

43 propositions de loi écrites ou co-signées et plus de 200 interventions en commission ou dans l’hémicycle te concernant! Quelle sera ta prochaine victoire?

I.E.: Nous avons ouvert cet entretien sur la question du logement, ce serait une victoire de voir mes prochains combats en la matière, avec en premier lieu la garantie universelle des loyers, aboutir !

Pour en savoir plus : https://www.parti-socialiste.fr/nosdeputes